Le Outreach worker (ORW) numérique: une nouvelle approche de Dialogai

Afin d’assurer le travail de prévention dans le milieu gay nous avons développé une nouvelle approche qui est celle du travail de proximité numérique. Il s’agit d’assurer une présence sur les plateformes de rencontres gays avec la posture d’un intervenant hors-murs. Les bénéfices d’une présence numérique à des fins de prévention sont multiples : elle offre une vitrine peu coûteuse, permanente des services de Dialogai ; nous pouvons répondre à notre mission d’information à travers des entretiens personnalisés et gagner en profondeur grâce au format anonyme par écran interposé et nous touchons une population variée, contrairement aux terrains physiques : les contacts dans la scène sont souvent les mêmes, ici, ils sont différents à plus de 92%.

De plus cette présence nous donne accès:

  • à une large partie de la population HSH confinée
  • à des groupes isolés, ne pouvant financièrement se permettre des rencontres dans les bars/saunas.
  • aux personnes issues et/ou appartenant à une minorité ethnique/culturelle.
  • à des personnes qui ne seraient pas sorties du placard (outing) auprès de leur entourage ou qui ne se considèrent pas comme étant gays et/ou bisexuels.
  • aux jeunes qui privilégient des moyens de communication propres à leurs générations.
  • à des personnes ne fréquentant par la scène gay physique pour des raisons de distanciation communautaire.
  • aux personnes proposant des prestations tarifées.

Les sites et applications de rencontre sont un moyen rapide, efficace, simple et peu coûteux en temps (absence de déplacement), en argent (les fonctionnalités de base sont généralement gratuites et les options payantes sont moins chères qu’un verre) et socialement (gestion de la visibilité). Ces canaux constituent un accès à bas seuil pour nombre d’hommes ne souhaitant/pouvant pas, ou pas régulièrement, se rendre dans des lieux physiques pour rencontrer de potentiels partenaires. Il semble que la plupart des HSH passent aujourd’hui (beaucoup) plus de temps sur les sites et applications de rencontre que dans les lieux de rencontre physique. C’est tout particulièrement le cas des plus jeunes générations et le cas de tous, en période de confinement. On y trouve aussi une forte proportion de personnes « hors milieu », qui se protègent derrière leur écran et trouvent sur ces sites la possibilité d’avancer masqués et de garder la discrétion voulue, l’anonymat afin de garantir leur droit à ne pas assumer leur homosexualité, bisexualité, ou transidentité, (60%) des personnes sont « hors milieu », ce qui n’est forcément pas le cas sur le terrain où les personnes que nous rencontrons ont souvent une appartenance à un groupe, et utilisent, pour certains, le lieu fréquenté comme un lieu de socialisation.

Nous dédions une présence moyenne d’un peu plus de 6 heures par jour (sur 4 jours par semaine). L’on commence à obtenir une interactivité exploitable après environ une heure de connexion et des entretiens personnalisés avec un minimum de 2 à 3 heures de présence permanente sur le site. Les visiteurs journaliers sollicités sont au nombre de 17 en moyenne, (contre 9 au bureau ou d’autres activités se déroulent en parallèle).

Des entretiens qui durent en moyenne 20 minutes

La durée moyenne des entretiens est de 20 minutes. En sortie physique, les entretiens sont d’une durée moyenne de 10 minutes pour une large majorité, quant aux longs entretiens, (ceux qui débouchent sur un dépistage par exemple), ils représentent uniquement 15% des contacts sur le terrain.

Nos interventions conjuguent prévention, promotion de la santé, conseils, mais aussi une orientation et une prise en charge ciblée. Nos entretiens numériques, sont dans 80% des cas, issus de réponses à des questions ou sollicitations des usagers, la démarche est une preuve de leur reconnaissance, (nous ne sollicitons pas les gens en les abordant avec des questions) ce qui est régulièrement le cas sur le terrain.

Quelques chiffres et statistiques

Parmi nos contacts, un tiers (31,7%) dit appliquer des règles SSR (Sexe Sans Risque), mais en même temps, un autre tiers (32,4%) ne se prononce pas sur le sujet, l’on peut estimer qu’ils ne sont, soit pas intéressés par le sujet soit ils n’ont pas de stratégie établie, mais ils communiquent avec nous. Ensuite, presque un quart utilise le préservatif et près de 8% « assument » le choix de négocier la « non protection ». Au final, 5,6% d’entre eux disent « être sous PrEP », ce qui est assez éloigné des 22% qui s’intéressent ou parlent du sujet dans nos conversations.

Assez logiquement, le profil portant le nom de Checkpoint Genève, les contacts les plus courants tournent autour des sujets relatifs au centre (la technique, comment se déroulent les tests, etc.), et tout de suite après le sujet qui ne laisse pas les membres de notre communauté indifférents : la PrEP, ce qui indique l’intérêt pour la recherche d’une stratégie de protection. Ensuite, le sujet « risques et pratiques » nous permettant d’informer et de corriger les fausses notions. Hormis le sujet d’actualité Sexe vs. Covid, la santé sexuelle, la sexologie et découverte, est aussi un sujet souvent abordé, et beaucoup auprès des plus jeunes. Concernant les symptômes, ils sont abordés soit par transmission d’information générique soit dans la prise de rendez-vous avec Checkpoint Genève.

Après 32 semaines de connexion, les chiffres sont les suivants : 2011 visiteurs, 1660 messages envoyés, pour 863 contacts qui génèrent 207 entretiens personnalisés. L’on peut remarquer des « contacts spontanés », au nombre de 119, qui débouchent sur 45 contacts et 32 entretiens personnalisés. L’on distingue aussi 67 « renvois » vers Checkpoint Genève et ses partenaires externes.

Ce texte est extrait de notre rapport d’activités 2020. Vous pouvez le lire dans son intégralité sur ce lien: https://www.dialogai.org/actualites/2021/03/ra2020/