Trois ouvrages pour les jeunes traitant de l’homoparentalité retiré des ventes et détruits à Singapour

tangoLes parents ne pourront plus les trouver en librairie. Le National Library Board de Singapour a pris cette semaine une décision plus que controversée : suite à une plainte, le choix a été fait de retirer trois livres pour enfants des ventes. En effet, ayant pour thème commun l’homoparentalité, les ouvrages ont été jugés comme allant à l’encontre des conceptions traditionnelles de la famille. Et pour avoir osé, les livres ne seront pas seulement retirés : ils iront directement au pilon…

Les ouvrages concernés sont And Tango Makes Three (histoire vraie de deux pingouins dans un zoo qui adoptèrent un poussin), The White Swan Express : A Story About Adoption, (l’histoire d’orphelins adoptés par des parents homosexuels), et Who’s In My Family : All about Our Families, qui dresse le portrait de plusieurs types de familles – dont plusieurs homosexuelles.

D’après un communiqué des librairies, les ouvrages n’étaient pas « appropriés » pour les enfants, et corrompraient l’image de la famille traditionnelle… D’après The Indepenant Singapore, certaines instances conservatrices et religieuses n’ont pas manqué d’applaudir la décision, louant l’intégrité de la décision.

L’initiative est venue d’un certain Teo Kai Loon, qui s ‘est indigné des contenus des livres. Selon Kirsten Han du Singapore Scene, il a en effet été « choqué de la représentation de familles constituées autrement que d’un père, une mère et de 3 enfants », et s’est donc plaint auprès du National Library Board. Chose troublante, il n’aura ensuite attendu que deux jours avant que l’organisation ne prenne une décision aussi lourde que celle de faire détruire les ouvrages mis en vente…

D’autant plus que Teo Kai Loon n’est pas, pour ainsi dire, l’observateur le plus impartial qui soit pour juger de la qualité des ouvrages, étant lui-même membre du groupe Facebook répondant au nom de We Are Against Pink Dot Singapore. Se définissant comme « un mouvement politique public », il entend lutter « contre la normalisation de l’homosexualité à Singapour », n’hésitant d’ailleurs pas comparer celle-ci à un cancer…

Pour autant, il est à noter que certaines instances de Singapour ne sont pas les seules qui souhaitent voir bannir certains des trois ouvrages des ventes… La New York Public Library notait déjà l’an dernier que « depuis sa publication chez Simon and Schuster en 2005, And Tanto Makes Three a atteint le top 10 des livres les plus controversés aux États-Unis. » De ce fait, l’ouvrage a déjà fait l’objet de nombreux bannissement de listes de lecture, catalogue de bibliothèques et autres incitations sa lecture. Lire : « Tango a deux papas » désormais livre réservé aux adultes

De vives réactions : la réalité « contradictoire » ? 

Quoi qu’il en soit, les réactions outrées n’ont pas manqué, et ce, de tous bords. Sur sa page Facebook, l’activiste et homme politique Vincent Wijeysinga a rappelé que trois Premiers ministres avaient déjà adopté des positions antidiscrimination en faveur de l’homosexualité.

De plus, il faisait également part d’une lettre ouverte écrite à destination du National Library Board, incluant quelques interrogations : « Vous décrivez les livres comme contenant “des contenus contradictoires”. Étant donné que l’un des livres est basé sur une histoire vraie, et qu’un autre se fonde sur l’idée que les familles sont unies par l’amour, pourriez-vous me dire qu’elle est la nature exacte de cette contradiction ? »

The Independant Singapore s’est quant à lui indigné du déni de réalité de la société singapourienne : « Je suis pro-famille. Je considère la famille comme sacro-sainte et les Singapouriens devraient protéger ce qui est l’une des plus anciennes institutions de la société. Mais dans la vie réelle, une famille ne consiste pas uniquement en seulement un homme et une femme, et des enfants. (…) Qu’ils reçoivent la bénédiction de notre société ou soient écartés de la définition de la famille, ces groupes sociaux [ LGBT ] sont présents dans notre société. »

Et soulignant que les livres permettent d’apprendre à découvrir l’autre : « Si les histoires contiennent la connaissance, et que les connaissances peuvent être employée comme un ou des outils dans un monde de plus plus en plus dépendant du savoir, souhaitons-nous que nos générations futures ne possèdent que des marteaux ? »

Un groupe Facebook a été créé  intitulé Singapore’s Parents Against Library Censorship réunissant à ce jour près de 1200 « j’aime ».