Quebec : pour pouvoir donner son sang, on peut être gay … mais on doit être abstinent

Dés le 22 juillet 2013, si vous êtes canadien et gay, vous pourrez de nouveau donner votre sang … à condition que vous n’ayez eu aucune relation sexuelle depuis le … 22 juillet 2008, relation sexuelle avec un homme, bien sûr. En fait vous pourrez donner votre sang, si vous n’êtes plus homosexuel … mais enfin devenu normal, soit hétérosexuel, ou à la rigueur asexuel!

Le Québec nous avait habitué à mieux en matière de non-discrimination envers les populations LGBT.

L’argumentation de l’association Hema-Quebec pour cette modification est plutôt floue :

– Explication scientifique : « Nous interdisons des donneurs à haut risque d’infection transmissible par le sang, malgré l’utilisation des tests de dépistage. Il existe en effet une période à risque (appelée « période silencieuse » ou « période fenêtre ») au cours de laquelle, même si une personne se sent bien et qu’un test de dépistage du VIH et des hépatites B et C s’avère négatif, cette personne est infectée et peut transmettre ces virus à une personne qui recevra son sang. »
– Explication communautaire :  » Certains groupes — en particulier les groupes qui représentent les personnes transfusées —se sont inquiétés de la possibilité que les hommes ayant eu des relations sexuelles avec d’autres hommes soient davantage à risque pour de telles infections émergentes. Compte tenu de cette possibilité, une période d’interdiction 5 ans a rassuré ces groupes sur notre capacité de mettre en place des mesures pour contrer ce risque en matière d’approvisionnement en sang. »

Pour complaire à certains groupes d’utilisateurs, dont par ailleurs les craintes sont fondées, Hema_Quebec demande à Santé Canada de fixer la durée de la période fenêtre à 5 ans.

Sur le site Portail Vih Sida Quebec, avec l’aval de  Santé Canada, on peut lire : « Le test de dépistage rapide du VIH détecte la présence des anticorps du VIH dans le sang. Ces anticorps apparaissent de quelques semaines à quelques mois après que le virus ait pénétré à l’intérieur du corps. Cette période est appelée la période-fenêtre. Pendant cette période, la personne est porteuse du VIH et peut le transmettre, mais les anticorps ne peuvent être détectés dans son sang.
La durée de la période fenêtre varie d’une personne à l’autre. Chez environ 80 % des personnes infectées, les anticorps deviennent détectables après six semaines. Mais chez certaines personnes, l’apparition des anticorps peut prendre jusqu’à trois mois (12 semaines). Pour cette raison, les tests de dépistage (rapide ou standard) atteignent une fiabilité maximale (à plus de 99 %) après trois mois. »

Il faut donc faire un choix de politique de santé publique, concernant la possibilité pour les hommes homosexuels de donner leur sang :
– soit on base l’interdiction sur la période fenêtre telle que décrite par tous les scientifiques et on pose une interdiction temporaire de trois mois après toute relation sexuelle à risque, ce qui ne signifie pas toute relation sexuelle avec un autre homme;
– soit on base l’interdiction sur le 1% des tests qui resteraient incertains et donc potentiellement susceptibles d’être contaminants et on pose une interdiction permanente pour tout homme ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes, sans critère de temps.

La plupart des pays occidentaux appliquent l’interdiction permanente dans la logique d’éviter tout risque même infinitésimal. Le Canada, comme toujours souvent pionnier, brise ce consensus mais la demi-mesure prise n’ajoute aucune clarté au débat.

Cinq ans après les déclarations du professeur   Bernard Hirschel, responsable de l’Unité VIH-sida des hôpitaux universitaires de Genève,  faisant état d’une absence de transmission du VIH dans le cas de couples sérodiscordants dont le partenaire séropositif, sous traitement antiviral qui conduit à un taux de virus indétectable, ne transmettrait pas dans les fait le virus en cas de pratiques sexuelles non-protégées et établissant une non-transmission du virus par voie sexuelle dans certaines conditions, ne serait-il pas temps de définir des conditions de transmission du virus par voie sanguine plus proche de la réalité et donc moins discriminantes pour la grande majorité des hommes qui ont des relations sexuelles avec d’autres hommes.

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