Discours de Emilie Flamand, directrice du BPEV à la Cérémonie à la mémoire de Bartholomé Tecia

Mme Emilie Flamand, directrice du Bureau de promotion de l’égalité et de prévention des violences du Canton de Genève.

Monsieur le Conseiller administratif,
Chers toutes, toux et tous,

Je remercie la Ville de Genève pour son invitation. Mme Nathalie Fontanet, conseillère d’Etat chargée de la promotion de l’égalité et de la prévention des violences, m’a demandé de la remplacer à cette occasion. Elle regrette beaucoup de ne pas pouvoir être présente, mais siège au Conseil d’Etat le mercredi matin.

Je profite de la présence de nombreuses personnes représentant le milieu associatif pour saluer la précieuse collaboration entre la Ville, le canton et les associations spécialisées dans la lutte contre les violences LGBTIQphobes, et aussi plus largement, contre toutes formes de violences et de discriminations.

En cette journée mondiale contre l’homophobie, la transphobie et la biphobie, le BPEV ajoute une nouvelle diapositive à sa campagne contre les violences domestiques. Celle-ci aborde la question des jeunes en questionnement sur leur identité de genre et le rejet auxquels iels peuvent être confrontées, et elle est diffusée dès aujourd’hui sur l’ensemble du réseau TPG.

Malgré les actions de prévention déployées, les violences et les discriminations envers les personnes LGBTIQ+ sont hélas toujours présentes dans notre société.

Bien des choses ont changé, toutefois, depuis l’exécution par noyade de Bartolomé Tecia.

En particulier, de nos jours, le rôle de l’Etat n’est plus de condamner les personnes LGBTIQ+, mais de les protéger et de contribuer à faire évoluer les mentalités afin qu’à terme, cette protection ne soit plus nécessaire.

Notre pays a connu des avancées importantes ces dernières années en matière de droits des personnes LGBTIQ+, avec la modification de l’art. 261bis du Code pénal visant à interdire les discriminations basées sur l’orientation sexuelle (mais hélas pas sur l’identité de genre), la très large acceptation par le peuple du mariage pour tous et toutes, ou encore la possibilité pour les personnes transgenres de faire modifier rapidement et simplement les indications concernant leur sexe et leur prénom à l’état civil.

Nous pouvons nous en réjouir, mais le combat n’est de loin pas terminé et c’est sans relâche qu’il faut continuer à agir pour étendre ces droits.

Au niveau genevois, après des années de travaux parlementaires, la Loi sur l’égalité et la lutte contre les discriminations liées au sexe et au genre (LED-Genre pour les intimes), a enfin été adoptée le 23 mars dernier. Le délai référendaire s’est achevé début mai sans que la loi ne soit contestée et elle pourra ainsi entrer en vigueur très prochainement.

Cette loi est une première en Suisse. Elle a bien sûr une portée concrète, puisqu’elle nous servira de base pour mettre en place toute une série de mesures, mais elle a aussi une portée symbolique.

En effet, une loi fait évoluer les représentations. Selon le Robert, une loi est une règle impérative, mais c’est aussi une règle exprimant un idéal, une norme. Ainsi, les femmes, les personnes LGBTIQ+ et toutes les minorités de genre concernées par cette loi passent de la marge à la norme.

Avec le vote de la LED-Genre, désormais à Genève, on affirme que:

  • La norme, c’est de reconnaître l’égalité de toutes les formes d’orientation affective et sexuelle, d’identité de genre, d’intersexuation et de structures familiales;
  • La norme, c’est de veiller à ce que toute personne soit respectée et considérée selon son identité de genre ou son expression de genre;
  • La norme, c’est d’interdire les violences et les discriminations directes ou indirectes fondées sur le sexe, l’orientation affective et sexuelle, l’identité de genre, l’expression de genre ou liées à l’intersexuation;
  • La norme, c’est de protéger l’intégrité corporelle, physique, et psychique des personnes trans* et intersexes;
  • La norme, c’est de tenir compte des spécificités et des besoins des familles arc-en-ciel;
  • La norme, c’est d’intégrer dans les statistiques pénales le caractère sexiste, homophobe, lesbophobe, biphobe ou transphobe des infractions traitées;
  • La norme, c’est de former le personnel de l’Etat aux questions d’égalité de genre et de lutte contre les violences et les discriminations.

La loi est là, désormais, pour rappeler ces normes, à celles et ceux qui pourraient les ignorer ou les oublier.

L’Etat et le BPEV ont maintenant un rôle important à jouer pour mettre en œuvre cette loi, en élaborant un plan d’action et en déployant des mesures. Mais vous aussi, qui travaillez ou vous engagez bénévolement dans le réseau associatif, vous pourrez la faire vivre en la faisant connaître, en vous y référant et peut-être parfois, en portant certaines situations devant les tribunaux pour la faire respecter.

Je forme le vœu que cet outil nous permette de faire progresser les droits des personnes LGBTIQ+, de nous éloigner de la sombre époque où l’on condamnait des personnes pour qui elles étaient, pour qui elles aimaient, et de nous rapprocher de celle où nous serons, tous, toux, toutes, chacun, chacune, libres d’être et d’aimer.

Merci pour votre attention.