Allocution de Nathalie Fontanet, Conseillère d’État lors Cérémonie à la mémoire de Bartholomé Tecia

Je remercie la Ville de Genève pour son invitation. Je salue également la précieuse collaboration entre la Ville, le canton et les associations spécialisées dans la lutte contre les violences homophobes et transophobes, et aussi plus largement, contre toutes formes de violences et de discriminations.

Les violences et discriminations envers les personnes LGBTIQ+ sont toujours présentes dans notre société et ont un impact sur la santé des personnes qui en sont victimes.

Elles affectent encore aujourd’hui leur qualité de vie, pouvant avoir un effet destructeur, même si ces violences ne prennent plus la forme extrême de la condamnation à mort, comme cela avait été le cas pour Bartholomé Tecia.

  • Rappel des derniers progrès en la matière

Heureusement, les efforts de sensibilisation et de communication ont montré, ces dernières années, une ouverture de la part de la population à une plus grande diversité des identités et des modes de vie. Ces changements, nous les devons, avant tout, à l’engagement des associations que vous représentez, ainsi que des militants et des militantes.

Ainsi, en septembre 2021, une large majorité de la population et des cantons a accepté en votation populaire le mariage pour tous, dont l’entrée en vigueur est fixée au 1er juillet prochain.A cette date, les couples du même sexe pourront se marier ou convertir leur partenariat enregistré en mariage.  Ils auront accès à la procréation médicalement assistée et à l’adoption.

Par ailleurs, depuis le 1er janvier 2022, les personnes transgenres peuvent faire modifier rapidement et simplement les indications concernant leur sexe et leur prénom dans le registre d’état civil. Une simple déclaration étant désormais suffisante, sans examen médical ou autres conditions.

  • Malgré ces avancées, le chemin à parcourir reste encore long

Plusieurs recherches rappellent la surexposition des personnes LGBTIQ+ aux violences et discriminations, que ce soit au travail, dans l’espace public et même au sein de la famille.

Des études effectuées en Suisse entre 2019 et 2021 ont montré qu’entre 30 et 40 % des personnes LGBTIQ+ interrogées ont, au cours de l’année précédant l’enquête, été harcelées sexuellement par des hommes et, entre 8 et 14 % par des femmes, sur le lieu de travail.

Ces recherches complètent et confirment les résultats de l’étude nationale suisse Etre LGBT au travail, réalisée en 2014 par l’Institut des études genres de l’UNIGE et la fédération genevoise des associations LGBT, qui montrait que sur les 1000 personnes ayant participé é l’étude, 29 % mentionnaient avoir subi des propos et gestes obscènes sur leur lieu de travail, 25 % un étiquetage en raison de leur expression de genre, 22 % un outing, et 21 % un étiquetageen raison de l’orientation sexuelle. 20,4 % exprimaient avoir subi du harcèlement sexuel, 19 % une mise à l’écart d’événement sociaux informels, 17 % une mise en doute des compétences professionnelles, et 14 % une mise à l’écart de l’équipe.

Les violences sont également présentes au sein de la famille.

Ainsi, une étude de l’Institut national d’études démographiques en France (INED) publiée en avril 2020 et consacrée aux violences intrafamiliales pendant l’enfance et la jeunesse, montre que les filles et les jeunes LGBT sont plus touchés.

Par exemple, les filles et femmes lesbiennes et bisexuelles sont trois fois plus nombreuses à avoir été confrontées à des violences psychologiques (23 % et 24 %) que les filles et femmes hétérosexuelles (6,6 %), tandis que les garçons et hommes gays et bisexuels le sont deux à trois fois plus (8,8 et 9,7 %), que les hétérosexuels (3,5 %).

Les violences subies en lien avec l’orientation sexuelle et affective incluent les insultes, les humiliations, la coupure des liens familiaux, les mises à la porte, les séquestrations, les coups – jusqu’aux tentatives de meurtre -, ou encore les agressions sexuelles.

Ces situations sont bien entendu inacceptables.

  • Ce que fait l’Etat de GE pour lutter contre les violences et discriminations envers les personnes LGBTIQ+

L’Etat de Genève s’investit depuis 2015 dans la lutte contre les violences et discriminations en raison de l’orientation affective et sexuelle, l’identité de genre, l’expression de genre et l’intersexuation. D’abord avec le mandat donné au BPEV, puis avec la création, en 2019, de la commission consultative LGBTIQ.

En tant qu’employeur,

En tant qu’employeur, nous avions, déjà en 2020, accordé 20 semaines de congé de naissance à un des parents dans un couple gay ayant eu recours à la GPA. Genève était ainsi devenu le premier canton à accorder des congés de naissance dans ce type de configuration. De cette manière, l’Etat reconnaître pleinement les réalités et diversités des structures familiales de son personnel et plus particulièrement celles des familles arc-en-ciel. 

L’Etat a aussi obtenu, en tant que Etat employeur, le Swiss LGBT Label qui l’engage à continuer à mettre en place des mesures spécifiques en faveur de l’inclusion et de la diversité au travail pour les aspects LGBTIQ.

Concernant la prévention du harcèlement sexuel au travail, nous avons créé un e-learning, obligatoire pour tout son personnel, qui complète le Kit de prévention, élaboré par le BPEV sous l’égide de la conférence suisse des déléguées à l’égalité, qui met en évidence des situations spécifiques de harcèlement en raison de l’orientation affective et sexuelle.

Le projet de loi sur l’égalité et la lutte contre les discriminations et les violences qu’elles soient fondées sur l’orientation sexuelle, l’identité de genre, l’expression de genre ou l’intersexuation (LELVDG) a été transmis au Grand Conseil en décembre 2020. Il est actuellement à l’étude devant la commission des droits humains. Ce texte a été passablement remanié, mais au final nous devrions aboutir à une loi spécifique sur les violences liées au genre. Loi qui s’intégrera dans une loi plus large, consacrée à différents types de discriminations.

Enfin, pour agir face aux violences intrafamiliales, dès le 17 mai et jusqu’à fin juillet, le BPEV met en circulation une nouvelle image dans le cadre de la campagne Stop Violences à la maison, diffusée sur l’ensemble du réseau des TPG. Elle aborde pour la première fois la problématique des violences intrafamiliales en lien avec l’orientation sexuelle et affective, afin de sensibiliser la population à ces formes particulières de violences et encourager les personnes concernées à demander de l’aide.

J’en profite pour remercier la précieuse contribution des associations. Leur travail quotidien est essentiel, que ce soit pour soutenir les victimes ou contribuer à changer les mentalités.

Enfin, je remercie les organisateurs de m’avoir invitée à participer à cette action symbolique, qui me permet de rendre hommage à toutes les personnes qui se sont battues et qui doivent se battre tous les jours pour avoir le droit d’être simplement qui elles sont.

Merci de votre attention.