Hollywood n’est toujours pas prêt pour un acteur de film d’action ouvertement gay

Si vous voulez incarner un homo à l’écran, aucun problème. Mais être homo «dans la vraie vie» et sauver le monde à l’écran, ce n’est toujours pas possible.

glass closet  En 2008, le magazine de la culture gay OUT mettait en couverture le journaliste star de CNN Anderson Cooper et l’actrice Jodie Foster avec le titre «The Glass Closet» («le placard de verre»). 

 Cinq ans après l’article de OUT, le «placard de verre» n’en est plus vraiment un: Anderson Cooper a fait son coming-out dans un e-mail à l’auteur Andrew Sullivan en 2012 . Jodie Foster l’a fait en 2013 pendant la cérémonie des Golden Globes.

wentworthEt beaucoup ont suivi à Hollywood: l’acteur de la série Prison Break, Wentworth Miller, l’acteur de la série Alias, Victor Graber, celui de la série Kyle XY, Matt Dallas, les actrices Raven-Symoné et Maria Bello, l’acteur vu dans Skyfall et Le parfum, Ben Whishaw, et pas mal d’autres moins connus.

Même dans le milieu sportif, réputé beaucoup plus macho que le milieu du show-business, plusieurs athlètes ont révélé leur homosexualité: du basketteur de la NBA Jason Collins au plongeur Tom Daley en passant par le footballeur Robbie Rogers ou le catcheur Darren Young.

Voilà. Hollywood (et le monde qui l’entoure) a changé. Dans une certaine limite…

rock hudson  Car il y a encore un tabou, un sérieux tabou. Celui des grands héros du cinéma populaire, les alpha-mâles des blockbusters, ceux qui jouent dans les films d’action, ceux qui jouent les super-héros, les hommes musclés, virils qui finissent inévitablement par embrasser leur partenaire féminine à la fin du film.

Il n’y a jamais eu de coming-out de ce côté-ci d’Hollywood. Rock Hudson, la plus grande star de comédies romantiques des années 1950-60, n’a jamais révélé son homosexualité jusqu’à sa mort du sida en 1985 –même si le tout Hollywood savait.

Depuis, rien n’a changé.

Au cinéma, c’est possible. Pour de faux. Jake Gyllenhaal, Jim Carrey, Ewan McGregor, Heath Ledger, Matt Damon, Michael Douglas, Tom Hanks ou Sean Penn l’ont bien prouvé.
liberace

Mais dans la vie réelle,  les acteurs craignent pour leur carrière. Ils craignent de ruiner les fantasmes de ces petits garçons et petites filles, de ces adolescent-e-s qui ont les posters de leurs films dans leur chambre, ces posters où ils étalent leurs muscles suintants et tiennent fièrement dans leur bras l’actrice qu’ils viennent de sauver des méchants aliens/terroristes.

Bref, s’entendre dire «tu es trop gay» par un producteur ou une directrice de casting n’est pas une option quand on postule au rôle de nouveau sauveur de l’humanité.

Voyez Luke Evans.
luke evans 1L’acteur britannique de 34 ans est sur le point de devenir le nouveau héros de films d’action qu’on s’arrache. Sa filmographie est réglée au millimètre pour atteindre cet objectif. La première fois qu’on l’a vu au cinéma, c’est dans le très viril Choc des Titans en 2010, suivi des Trois Mousquetaires et des Immortels en 2011. Cette année, on l’a vu dans Fast & Furious 6, dans le rôle du méchant, et dans Le Hobbit dans le rôle de Bard.

 

Résultat: en guise d’apothéose à ce début de carrière sévèrement burné, il a été choisi pour être le nouveau The Crow et le nouveau Dracula dans Dracula Untold.
luke evans hardcore
Sauf que Luke Evans, il y a plus de dix ans, en 2002, lorsqu’il était jeune premier dans la comédie musicale de Boy George Taboo, se disait ouvertement gay dans le magazine The Advocate. «Des gens viennent me voir dans les pubs, les pubs gay bien sûr, et n’arrivent pas à croire que je sois gay!» disait-il fièrement.

Deux ans plus tard, il réitérait même le message dans le magazine gay londonien QX alors qu’il jouait dans la pièce Hardcore, sur l’industrie du porno: «Je l’ai fait pour moi. Je n’étais pas heureux de vivre dans le mensonge. Alors jouer dans Taboo était le bon moment de faire mon coming-out. Et ça n’a pas du tout gêné ma carrière

Mais, en 2011, au début de sa carrière de mâle triomphant, la biographie de Luke Evans opère un changement brutal à l’image de  sa fiche Wikipédia  se transformant de «Luke Evans est ouvertement gay» en «Luke a une vie privée et parle rarement de sa vie personnelle»

 Evidemment, le problème n’est pas de savoir si l’acteur est hétéro, homo ou bi. On s’en fout! Le problème, c’est la manipulation évidente de la communication entourant l’acteur pour protéger sa carrière : un acteur qui postule à sauver le monde dans des blockbusters hollywoodiens ne peut en aucun cas être un homme ouvertement gay.