Venerabilis.com : Le site officiel du Vatican pour les prêtres catholiques gays ?

Venerabilis (le site hébergé en Turquie a été remplacé par un blog ouvert seulement aux « membres ») est un site très discret qui existe depuis 2007. Il aurait bien voulu garder son anonymat mais les propos que l’on prête au pape François sur un « lobby gay » au Vatican l’ont exposé malgré lui. La plateforme internet a vu le jour en 2007, sous l’impulsion d’une mystérieuse Fraternité des prêtres catholiques romains homosensibles (« Homosensible Roman Catholic Priests Fraternity »). L’initiative est venue de prêtres italiens, qui composent la majorité des commentaires, ajoute le quotidien suisse alémanique Tages-Anzeiger.

Le site regroupe des prêtres catholiques homosexuels qui forment une mystérieuse fraternité. Secrète bien entendu ! Il est précisé que le site doit rester soft, n’a rien de porno, et que le sexe trop explicite n’y a pas sa place. Il n’en demeure pas moins que la fraternité regroupe des prêtres gays, dont certains sont en poste au Vatican, et peut-être très élevés dans la hiérarchie : des évêques, des cardinaux ? A noter que le chat est fréquenté aussi par des homos non ecclésiastiques, qui apprécient de pouvoir échanger sans avoir à aborder l’idée d’une consommation sexuelle concrète. Les sites de rencontres gays étant parfois très crus à ce niveau.

« Heureux êtes-vous quand on vous insultera, qu’on vous persécutera, et qu’on dira faussement contre vous toute sorte d’infamie à cause de moi. Soyez dans la joie et l’allégresse, car votre récompense sera grande dans les cieux. » C’est par ces mots tirés du sermon sur la montagne, rapporté dans l’évangile selon Saint-Matthieu, que s’ouvre le site de la « confraternité homosexuelle des prêtres catholiques« . Le nom est en latin, le domaine en … Turquie et ses fondateurs au Vatican. Venerabilis est réglé par un modérateur aguerri.

La prudence est de mise. Les interlocuteurs se gardent de donner des renseignements qui pourraient laisser deviner leur identité.

Le pourcentage de prêtres gays au Vatican est important, plus encore que dans le reste du clergé. Il est évidemment difficile de l’évaluer quantitativement.. Au fil des années, la relative tolérance de jadis a fait place à un esprit de terreur, les ecclésiastiques concernés redoutant une sanction, voire d’être limogés. L’affaire Stenico éclata en son temps comme une bombe en plein ciel. Mgr Tommaso Stenico, né en 1947, essayiste brillant, ancien collaborateur très proche du cardinal Silvestrini, chef de bureau influent de la congrégation du clergé, était connu pour ses manœuvres en vue de se faire nommer évêque d’un diocèse italien (Assise puis Pérouse) ou archevêque de Curie. Se donnant volontiers pour un homme à femmes (!), le monsignore draguait en fait volontiers des hommes. Un jour qu’il faisait des propositions très explicites à un jeune homme .. dans les bureaux même de sa congrégation, il fut piégé par une caméra ! Après avoir nié, il prétendit avoir en effet sollicité le jeune homme mais parce qu’il menait une enquête sur l’homosexualité dans le clergé, afin de débusquer les gays cachés au Vatican (!) et de combattre ce redoutable fléau ! Cette défense peu crédible et très piteuse ruina le peu de crédit dont il jouissait encore.

Dans un passé récent, c’est un secrétaire de congrégation (archevêque donc) qui vit sa carrière cassée. De notoriété vaticanesque il hantait certaines plages romaines couleur arc-en-ciel, dans la tenue d’Adam dit-on ! Deux prêtres italiens de la secrétairerie d’Etat, attachés au secrétariat personnel de Mgr Jean-Louis Tauran, alors secrétaire pour les relations avec les États, avaient pris pour habitude de surfer sur les sites gays à partir de leur ordinateur des bureaux de la Curie. Le pot aux roses fut découvert. Ils furent renvoyés. L’un d’entre eux quitta les ordres et a ouvert un excellent restaurant qu’il tient avec son compagnon.

L’existence de ce site internet confirme, si besoin était encore, la forte présence homosexuelle au Vatican, au plus haut niveau. En soi, dans cet univers qui ignore les femmes, il n’y a là rien de très étonnant. Ce qui choque c’est le hiatus entre les discours officiels, de plus en plus durs et la réalité humaine en partie sur les conseils de Mgr Tony Anatrella, que les lecteurs de Golias connaissent bien, et d’un étrange official de la congrégation des évêques, Mgr Andrew Baker. Ce dernier, proche du cardinal Justin F. Rigali, archevêque de Philadelphie et longtemps en poste à la Curie, soutient en effet que l’accès de gays à la prêtrise doit être empêchée et que leur ordination est moralement nulle. Dans le même esprit, la congrégation pour l’éducation catholique publia en 2006 un texte fermant l’accès au sacerdoce pour des candidats présentant une homosexualité foncière. Se gardant cependant d’évoquer le cas des prêtres déjà ordonnés, obligés de mener une vie digne. Toutefois, la congrégation pour la discipline des sacrements, alors présidée par le cardinal Jorge Arturo Medina Estevez, avait décidé que l’homosexualité justifiait le retour à l’état laïc d’un prêtre qui le demandait, car elle entachait de nullité son engagement. Enfin, récemment, la congrégation du clergé émit de nouvelles normes pour la reconduction des prêtres à la vie laïque. Parmi les cas imposant un tel retour il y a celui d’une vie scandaleuse : autrement dit, un prêtre notoirement homosexuel pourrait être contraint à quitter l’état clérical.

Le grand public est amusé ou irrité par ce contraste entre, d’une part,  une volonté de purge et d’autre part, le fait qu’un nombre important de prêtres, y compris et surtout au Vatican même, soit concerné par la question. Mgr Gabriele Montalvo, jadis président de l’académie pontificale ecclésiastique, aujourd’hui défunt, confia d’ailleurs à un journaliste de Golias que les quatre cinquièmes des futurs diplomates du Saint-Siège, ses étudiants, étaient gays !

Un prêtre a un jour résumé de façon aussi concise que pertinente l’attitude du Vatican voulant expurger les homosexuels : « Ils se tirent une balle dans le pied« . On ne saurait mieux dire.

Source : Golias (2010)