Suite à une pétition déposée par Dialogai en 2004, le parlement genevois demande que l’homophobie devienne un délit pénal en Suisse

Les députés genevois font usage de leur droit d’initiative. Le parlement fédéral est prié de faire de l’homophobie un délit pénal.

A la base de cette décision, une  pétition déposée par Dialogai en 2004 demandant
« – La promotion de l’élargissement à la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle des directives contre le racisme et l’intolérance;
– La prise de mesures positives pour combattre les attitudes homophobes, en particulier à l’école, dans le domaine médico-social, la police, le milieu judiciaire, ainsi que dans le sport, et ce par l’intégration de ces mesures dans la formation professionnelle de base et continue;
– Une concertation avec les associations concernées pour lancer une vaste campagne d’information auprès du public sur toutes les formes de discriminations liées à l’homophobie;
– L’application des mesures judiciaires existantes et la mise en place de nouvelles mesures sanctionnant ceux qui discrimineraient les homosexuel-le-s ainsi que ceux qui exerceraient une violence à l’égard de cette population;
– La garantie de l’égalité de traitement dans tous les domaines pour les homosexuelles;
– La reconnaissance de la persécution des homosexuel-le-s comme juste motif d’asile;
– La nomination de personnes expertes en matière de discrimination fondée sur l’orientation sexuelle dans les structures de protection des droits fondamentaux et de médiations existantes ou à mettre en place. »
(Téléchargez l’intégralité des documents)

Ces revendications concernant l’inscription de la pénalisation de l’hompophobie dans la Constitution et le Code Pénal, ont été depuis portées par toutes les associations LGBT cantonales.
Comme pour le PACS il y a quelques années, Genève est pionnière dans la défense de l’égalité de traitement de tou-te-s les citoyen-ne-s, y compris les personnes homosexuel-le-s.
Le canton va donc faire usage de son droit d’initiative cantonale et saisir le parlement fédéral pour lui demander d’inscrire dans la Constitution suisse et dans le Code pénal une disposition faisant de l’homophobie un délit.

Pour ce qui est du Code pénal, c’est l’article 261 bis (qui contient aussi la norme antiraciste) qui est modifié. Ceci en ajoutant l’orientation sexuelle et l’identité de genre dans la liste des qualités ouvrant la voie à une poursuite en cas d’appel à la haine ou à la discrimination. Quant à la Constitution fédérale, c’est l’article 8, alinéa 2 qui serait modifié dans le même sens. (Téléchargez l’intégralité des documents)

Les débats ont été sereins et dépassionnés: la demande de saisine des Chambres a été votée à l’unanimité des députés (moins un UDC). Le texte va maintenant aller à Berne. Jacqueline Roiz (verte), auteure du rapport de commission, est optimiste – «ou plutôt réaliste» – quant à la possibilité de créer des majorités à Berne. «Les esprits évoluent, la Suisse était effectivement précurseur en la matière, notamment avec l’acceptation par le peuple des Pacs», note son collègue Miguel Limpo, «mais aujourd’hui, elle se retrouve dépassée par des pays comme la France ou l’Espagne, il y a un rattrapage à opérer».

Il ne s’est trouvé aucun député pour critiquer la loi. «Idéalement, notre but sera atteint lorsqu’il y a aura un droit d’indifférence en matière d’orientation sexuelle», a expliqué Anne-Marie von Arx Vernon. Même sur les bancs populistes, Dominique Rolle (MCG) a plaidé pour des comportements pacifiés: «Trop de jeunes utilisent encore l’injure ‘sale pédé’, il faut leur faire comprendre que c’est inadmissible.» En commission, l’impact de comportement homophobes – 20% des personnes des minorités sexuelles traversent des phases suicidaires – a visiblement ébranlé nombre de députés.

Le dossier n’est pas entièrement clos. Un projet de motion est encore inscrit à l’ordre du jour et devait être traité prochainement. Un texte qui trace des pistes relatives aux actions que l’Etat devrait entreprendre. Que ce soit au niveau de la formation du corps enseignant, en passant par les contrats de prestations signés avec les associations sportives, jusqu’à la revendication que ces politiques publiques soient évaluées.

Source : Philippe Bach, Le Courrier